Une détonation soudaine et explosive. C'est le résultat tragique du déclenchement accidentel d'une mine terrestre cachée. Ceux et celles qui survivent à une telle explosion souffrent souvent de blessures qui bouleversent leur vie.
Jody Williams était déterminée à éliminer ces armes de guerre brutales, menaces pour les civils, et son travail a contribué à mobiliser des gens et des organisations du monde entier en vue de convaincre leurs gouvernements d'interdire totalement les mines terrestres. Elle a reçu le prix Nobel de la paix en 1997 pour ses efforts incroyables.
Jody Williams était déterminée à éliminer ces armes de guerre brutales, menaces pour les civils, et son travail a contribué à mobiliser des gens et des organisations du monde entier en vue de convaincre leurs gouvernements d'interdire totalement les mines terrestres. Elle a reçu le prix Nobel de la paix en 1997 pour ses efforts incroyables.
Jody Williams a passé la majeure partie de sa vie à militer pour la paix et les droits de la personne. Elle croit aux droits de la personne et à la responsabilité qu’ont les gens d’apporter des changements positifs et de créer le monde dans lequel nous voulons vivre.
Originaire du Vermont, Jody Williams s’est impliquée dans des protestations contre la guerre du Vietnam alors qu’elle était étudiante à l’université. C’est alors qu’elle a découvert que les politiques américaines avaient souvent de graves conséquences négatives pour d'autres pays. Ceci l'a amenée à travailler avec différentes campagnes en Amérique centrale, notamment avec Medical Aid for El Salvador, pour diriger un programme qui transportait aux États‐Unis des enfants blessés pendant la guerre pour qu’ils y reçoivent des soins médicaux.
Elle est ensuite devenue la coordonnatrice d’une campagne internationale qui a abouti à une interdiction mondiale des mines terrestres. En reconnaissance de ses efforts, elle a reçu le prix Nobel de la paix en 1997, conjointement avec la Campagne internationale pour interdire les mines, pour leur travail en faveur de l'interdiction des mines antipersonnel et du déminage.
Un mouvement mondial pour la paix
Les mines terrestres antipersonnel (mines enfouies dans le sol qui explosent au contact d'une personne) sont devenues d'usage courant pendant la Seconde Guerre mondiale et ont continué à être utilisées pendant le reste du 20e siècle.
Dans les années 1980 et au début des années 1990, les mines terrestres ont été de plus en plus considérées comme une arme de guerre particulièrement brutale en raison de leur impact dévastateur sur les civils et les communautés longtemps après la fin des conflits. Les mines terrestres ne sont généralement pas retirées du sol après un conflit et constituent donc une menace permanente pour les communautés, notamment en privant les citoyens d'eau, de terres et d'autres ressources et en limitant le développement social et économique. Au cours des années 1990, on estimait que plus de 20 000 personnes étaient tuées chaque année par des mines terrestres. D'innombrables autres ont subi des blessures dévastatrices.
Jody Williams raconte comment Bobby Muller, de la fondation Vietnam Veterans of America, et Thomas Gebauer, de Medico International, l’ont approchée pour diriger une campagne visant à interdire les mines terrestres.
Video : Histoire orale : Jody Williams – 1
Avec Jody Williams comme coordonnatrice fondatrice, six organisations non gouvernementales (ONG) se réunissent pour lancer la Campagne internationale pour interdire les mines (IBCL). Elles représentent plusieurs nations et divers domaines d’expertise liés aux mines terrestres :
Au cours des années suivantes, la campagne réussit à obtenir un soutien mondial croissant en faveur d'une interdiction totale des mines terrestres. Les travaux de l’ICBL comprennent :
sensibiliser le public aux effets des mines terrestres antipersonnel et mobiliser les gens pour qu'ils passent à l’action;
bâtir une coalition de soutien entre des centaines d'ONG à travers le monde;
faire pression sur les gouvernements pour qu'ils mettent fin à leurs pratiques d'utilisation et de production de mines terrestres et pour qu'ils soutiennent une interdiction complète de ces armes.
L’ICBL met également l'accent sur les effets dévastateurs des mines sur les vies humaines, notamment les décès ou les blessures débilitantes, ainsi que sur les conséquences sociales et économiques pour les communautés. Au fur et à mesure que la prise de conscience prend de l’ampleur, les citoyens et citoyennes demandent à leurs propres gouvernements de cesser d'utiliser, de produire et d'exporter ces armes. En tant que campagne unique qui rassemble des personnes et des organisations du monde entier pour faire pression en faveur du changement, la Campagne internationale pour interdire les mines a fourni un nouveau modèle qui montre que les gens ordinaires peuvent être actifs et efficaces pour une cause, jusqu’à influer sur le droit international.
Au fur et à mesure que l'appui des gens, des ONG et des gouvernements du monde entier s'est accru, le gouvernement canadien a joué un rôle de premier plan en veillant à ce que ces efforts aboutissent à un traité officiel. Baptisé le « processus d'Ottawa », le gouvernement canadien a d'abord été l'hôte d'une conférence à Ottawa en 1996, réunissant les pays pour discuter d'une stratégie pro‐interdiction. À la fin de la conférence, le ministre des Affaires étrangères du Canada, Lloyd Axworthy, a lancé un défi aux participants, les invitant à négocier un traité d'ici un an pour interdire complètement les mines terrestres et à revenir ensuite à Ottawa pour le signer. Plusieurs gouvernements s'étaient déjà engagés à interdire complètement ou temporairement les mines terrestres à cette époque, et d'autres pays étaient très impliqués dans le processus d'Ottawa, notamment la Norvège, l'Autriche et l'Afrique du Sud.
Le prix Nobel de la paix
Le 10 octobre 1997, moins de deux mois avant la signature prévue du traité à Ottawa, le Comité Nobel a décerné le Prix de la paix 1997 conjointement à la Campagne internationale pour interdire les mines et à Jody Williams. Le Comité a décrit sa décision à Oslo ainsi :
L’ICBL et Jody Williams ont entamé un processus qui, en l’espace de quelques années, a fait passer l’interdiction des mines antipersonnel d’une vision à une réalité palpable. La Convention qui sera signée à Ottawa en décembre de cette année est dans une large mesure le résultat de leur important travail.
Il y a déjà plus de 1 000 organisations, grandes et petites, affiliées à la Campagne internationale pour interdire les mines, qui constituent un réseau à travers lequel il a été possible d’exprimer et de faire entendre une large vague de mobilisation populaire, d’une manière sans précédent. Les gouvernements de plusieurs petits et moyens pays se sont saisis de la problématique et ont pris des mesures pour y faire face, et ce travail est devenu un exemple convaincant d’une politique de paix efficace.
Le Comité Nobel norvégien souhaite exprimer l’espoir que le processus d’Ottawa obtiendra un soutien encore plus large. En tant que modèle pour des processus similaires à l’avenir, il pourrait s’avérer d’une importance décisive pour l’effort international en faveur du désarmement et de la paix1.
Dans cette entrevue, Jody Williams se penche sur la décision du Comité Nobel de reconnaître le rôle des citoyens et des citoyennes qui travaillent ensemble pour une interdiction mondiale des mines antipersonnel.
Les 3 et 4 décembre 1997, la Convention sur l’interdiction des mines a été signée à Ottawa par 122 pays. L’accord international interdit l’utilisation, la production, le stockage et le transfert de mines terrestres antipersonnel, tout en soulignant les efforts de déminage et en réclamant une assistance pour les victimes des mines terrestres. La Convention a été très efficace et est largement mise en œuvre et appliquée dans le monde entier. En conséquence, des millions de mines terrestres ont été enlevées et détruites, de nouvelles mines terrestres sont maintenant rarement produites et il y a moins de victimes d’explosions chaque année.
Jody Williams concentre maintenant ses efforts sur le soutien d’autres femmes qui travaillent pour le changement. Elle a cofondé le projet Nobel Women’s Initiative, un groupe composé de sept lauréates du prix Nobel qui travaillent ensemble pour la paix, l’égalité et la justice. Elles utilisent leur position de lauréates et de militantes pour attirer l’attention sur les femmes qui luttent pour la paix, notamment en participant à des missions d’établissement des faits, en servant de témoins dans des conflits en cours et en lançant une campagne pour mettre fin au viol et à la violence sexuelle dans les conflits.
En 2016, Jody Williams et Rigoberta Menchú Tum, sa collègue lauréate du prix Nobel, se sont rendues au Guatemala pour servir de témoins et apporter leur soutien aux femmes lors du procès de Sepur Zarco. Le procès concernait 15 femmes mayas qui ont porté plainte contre l’armée pour esclavage sexuel pendant la guerre civile. Deux anciens responsables militaires ont été condamnés pour crimes contre l’humanité dans ce qui était un jugement révolutionnaire en matière de violence sexuelle en période de conflit armé.
En tant que lauréate du prix Nobel, Jody Williams s’adresse souvent à des élèves qui lui demandent comment ils peuvent faire une différence dans un monde qui semble parfois hors de contrôle.
Video : Histoire orale : Jody Williams – 3
Elle leur demande alors : qu’est-ce qui vous indigne le plus au sujet de l’injustice? Elle leur conseille de devenir bénévole auprès d’un organisme qui travaille sur la question qui vous préoccupe afin de bien comprendre ce qu’il faut pour contribuer au changement. Selon Jody Williams, la façon d’aller de l’avant, c’est de comprendre la question ou le problème qui vous tient à cœur, puis de décider ce que vous êtes prêt ou prête à faire pour changer les choses.
Quelle est votre responsabilité de vous impliquer?
Quelle injustice vous touche le plus?
Avec quels organismes pourriez‐vous communiquer pour apporter des changements constructifs?
Auteure
Julia Peristerakis est conservatrice, Mouvements sociaux et changement. Elle supervise les galeries Chaque geste compte et Inspirer le changement et a organisé plusieurs expositions temporaires.
Matthew, Richard A., Bryan McDonald, and Kenneth R. Rutherford. Landmines and Human Security : International Politics and War’s Hidden Legacy. Albany : SUNY Press, 2004.
Williams, Jody. My Name is Jody Williams : A Vermont Girl’s Winding Path to the Nobel Peace Prize. Berkeley : University of California Press, 2013.
Williams, Jody, Stephen D. Goose, and Mary Wareham. Banning Landmines : Disarmament, Citizen Diplomacy, and Human Security. Lanham : Rowman & Littlefield Publishers, 2008.
Références
1Le prix Nobel de la paix 1997. NobelPrize.org, Nobel Media AB 2018, consulté le vendredi 26 octobre 2018.
2Bien que communément appelée Convention sur l’interdiction des mines, son titre officiel est la Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction. L’accord est également appelé la Convention d’Ottawa.
3Archbishop Desmond Tutu, préface du livre Banning Landmines : Disarmament, Citizen Diplomacy, and Human Security, édité par Jody Williams, Stephen D. Goose et Mary Wareham, Lanham, Rowman & Littlefield Publishers, 2008, p. ix.
Citation suggérée
Citation suggérée :
Julia Peristerakis. « Jody Williams et la campagne pour interdire les mines ».
Musée canadien pour les droits de la personne.
Publié
le 27 mars 2019. https://droitsdelapersonne.ca/histoire/jody-williams-et-la-campagne-pour-interdire-les-mines